La décision du juge suprême a été accueillie sans vindicte par le parti d'extrême droite, à l'évidence soucieux de ne pas s'aliéner les élus - surtout des maires - susceptibles de lui permettre de disputer le sprint final. "Maires de France, la République vous appelle", a lancé Louis Aliot, vice-président du FN.
La candidate a cherché à retourner à son profit cette décision négative pour elle: "s'il devait être apporté une preuve que je suis bien la candidate du peuple contre le système, je remercie le Conseil constitutionnel de l'avoir donnée aujourd'hui", s'est-elle exclamée en déplorant qu'il n'y ait "plus de fonctionnement démocratique dans notre pays"
L'alarmisme ne paraît plus de saison dans son équipe. Confronté au même problème à cinq reprises, Jean-Marie Le Pen a affirmé mardi que, "heureusement", la candidate d'extrême droite approchait de la barre fatidique des 500 ("440 promesses", a précisé sa fille).
Le fait qu'elle soit aujourd'hui peu susceptible d'accéder au second tour, à en croire les sondages, pourrait l'aider dans cette entreprise.
Une grande partie de la classe politique - et une majorité de Français selon des sondages - considère qu'il ne serait "pas normal" que le FN ne soit pas représenté, Marine Le Pen recueillant de 15 à 17% des intentions de vote dans les enquêtes d'opinion.
Le président Nicolas Sarkozy avait estimé le 9 février qu'"un courant politique qui réunit plusieurs millions de citoyens à chaque élection doit pouvoir être représenté" à la présidentielle. Une manière de "libérer" des maires réticents à donner leur parrainage à Mme Le Pen, selon le constitutionnaliste Didier Maus.
Le candidat socialiste François Hollande s'est dit favorable à une réforme "ultérieure" pour que "des citoyens puissent eux-mêmes parrainer dans certaines circonstances".
Marine Le Pen n'est pas la seule à "ramer désespérément", selon l'expression de son père pour réunir les 500 précieux sésames. Sont aussi sur la tangente l'ex-Premier ministre Dominique de Villepin, l'écologiste Corinne Lepage (qui s'était jointe à la réclamation du FN), les postulants d'extrême gauche Nathalie Arthaud et Philippe Poutou, le "chasseur" Frédéric Nihous, voire Nicolas Dupont-Aignan.
Les premiers formulaires officiels de parrainages seront envoyés aux élus dès la semaine prochaine. Ils devront être déposés d'ici le 16 mars au Conseil constitutionnel.
Dans sa décision, sans surprise, le Conseil constitutionnel affirme, contrairement à Mme Le Pen, que la règle de la publicité, inscrite dans la loi organique du 6 novembre 1962, n'est pas contraire au "principe du pluralisme des courants d'idées et d'opinions" d'une démocratie.
Le fait que, depuis 2008, ce principe soit garanti par la Constitution "ne crée pas un droit pour les partis à participer à chaque élection et notamment à l'élection présidentielle", écrit le juge suprême dans un commentaire de sa décision, qui invoque aussi la "transparence" en démocratie.
A l'audience jeudi dernier, Louis Aliot avait soutenu que "si des pressions et des menaces existent" sur les maires - dont il avait fourni des preuves -, "alors il n'y a aucune transparence possible".
Présidé par Jean-Louis Debré, le Conseil constitutionnel a écarté un autre grief: le fait que la publicité des parrainages violerait "les principes d'égalité et de secret du suffrage". Pour la juridiction, "la présentation de candidats par les citoyens élus habilités ne saurait être assimilée à l'expression d'un suffrage".